""L'écriture ? Elle tient
dans le partage humain.
Un partage en profondeur
autour de questions telles que :
qu'est-ce qui fait un être humain ?
Qu'est-ce qui nous fait nous émerveiller ?
Qu'est-ce qui nous fait
nous révolter… ?"
P.L.

Accueil
Remonter
 
Cursives 84
"Aujourd'hui, pour la première fois… "
Un entretien avec Pascale LASSABLIERE
animatrice d'ateliers d'écriture

"J'œuvre actuellement dans le secteur de l'alphabétisation dans une association qui s'appelle Lire et Écrire.
Pendant huit ans, j'ai été formatrice avec des adultes qui apprennent à lire et à écrire. Et pour le moment, je travaille avec un groupe d'apprenants et formateurs autour de la question scolaire en lien avec l'illettrisme."

 

 

 

 

 

Pascale Lassablière : … Pour moi, l'alphabétisation, qui entre dans le cadre de l'Éducation populaire, ne se réduit pas seulement aux apprentissages nécessaires pour savoir remplir un papier ou faire un calcul. Il s'agit, à travers la lecture et l'écriture, de comprendre le monde, d'avoir accès à ses droits, accès à la connaissance.

 


Filigranes : Est-ce dans ce cadre de l'alphabétisation que tu mènes des ateliers d'écriture ?

P.L. : Si je fais des ateliers d'écriture, c'est d'abord parce que je vous ai rencontrés, Odette et Michel, à l'occasion d'une formation organisée par Lire et Écrire à l'intention de son personnel. Je n'avais jamais entendu parler d'ateliers de création auparavant et l'idée d'en mener avec des adultes en grande difficulté avec l'écrit m'intriguait tout particulièrement. Par la suite, j'ai animé pendant 5 ans un atelier d'écriture avec un groupe d'adultes en alphabétisation.
Quelques années plus tard, aujourd'hui donc, j'anime environ trois ateliers par semaine : un premier avec des détenus en prison sur lequel on reviendra ; un autre dans un quartier populaire de ma ville, un atelier intergénérationnel pour lutter contre la solitude. S'y se retrou-vent des personnes qui vivent seules, certaines ont peu ou pas de lien avec une activité sociale (chômeurs, personnes pensionnées, avec des problèmes de santé…). Nous avons également des jeunes d'une entreprise d'insertion. Les participants ont entre 19 et autour de 70 ans, en passant par toutes les dizaines ! Et enfin un troisième atelier, à la demande d'une petite association de Verviers (Belgique) qui accueille des primo arrivants.

 

Filigranes : Sur cette base, qu'est-ce qu'un atelier d'écriture pour toi ?


P.L. : Un mélange de plusieurs choses. Il s'agit d'entretenir une certaine magie, quelque chose de mystérieux qui fait que celui qui se met à écrire a soudain envie d'écrire de plus en plus. L'envie de mettre tout cela sur le papier, ne pas le garder pour soi, le partager. Donc lire ou être lu.
Lire son texte devant les autres, c'est un moment extraordinaire et cela fait du chemin dans les esprits. D'un atelier à l'autre, d'une séance à l'autre, il se passe donc des choses dans l'esprit des participants et cette transformation-là, elle est passionnante.
L'atelier d'écriture, c'est aussi un accès à la culture, à la philosophie, au livre, à la peinture. Quand j'ai commencé avec vous, vous apportiez, vous aussi, toutes sortes de matériaux en écho avec votre vie, votre expérience professionnelle, vos lectures. Dans les dispositifs que vous mettiez en place, tout le monde faisait évidemment des liens. La culture n'est donc pas réservée aux artistes ou aux érudits et son accès doit toujours être ouvert.
L'écriture en atelier, ce sont aussi des consignes. Chacun est libre de se positionner par rapport à elles. Il arrive que certains n'écrivent pas et veulent uniquement peindre. Cela ne me pose pas de problème. Une consigne, ce n'est rien d'autre qu'un chemin. On peut aller dans le pré d'à côté, prendre un autre chemin, ou garder celui-là et courir, ce qui est intéressant c'est ce que cela produit, c'est le travail qui est fait.

 


Filigranes : Penses-tu que l'écriture, mais aussi les arts plastiques puissent compenser ou panser les plaies de la vie ?

P.L. : Je ne sais pas si cela panse, mais celui que j'ai en tête, c'est un apprenant que je connais depuis 10 ans et qui, un jour, m'a dit : "moi, c'est avec les ateliers d'écriture que j'ai commencé à aimer l'écriture !" Il était en grande difficulté et il ne voyait pas beaucoup de progrès arriver. Or, avec l'écriture, une chose magique s'est opérée. Non seulement il a acquis de la technique (césure des mots, un écrit qui devient lisible), mais également il s'est mis à écrire seul des poèmes. Cela l'a rendu plus sûr de lui, fier même, et il s'est réalisé. Il travaille à présent comme éboueur. Il continue à fréquenter l'atelier d'écriture, celui qui se passe en ville le jeudi matin, il arrive en habit de travail ! Pour lui, écrire est presque devenu une raison de vivre…
Panser ? Compenser ? À y réfléchir, j'ai du mal à répondre à cela. Certainement parce que je ne considère jamais les personnes comme des êtres frappés de blessures familiales ou sociales, mais comme des humains qui font un chemin. Moi aussi j'ai des blessures, moi aussi je fais un chemin et je me sens en communion avec eux. Il y a du plaisir dans l'écriture ! De la transformation ! L'envie de donner le meilleur de soi ! C'est ce qui m'intéresse.

L'atelier de Verviers


Filigranes : Parle-nous à présent des ateliers que tu mènes en prison dans le cadre de Mots'Art, l'activité que tu as créée.


P.L. : Pour les prévenus avec lesquels je travaille à présent, l'atelier est devenu un rendez-vous. Au départ, c'est "une occupation" au même titre que d'autres occupations qu'ils peuvent choisir. Je travaille en lien avec l'éducatrice de la prison qui propose également un atelier guitare, des séances de ping-pong… Maintenant, les participants ne disent plus : "je vais à l'atelier d'écriture" mais à Mots'art. Il y a là bien plus qu'une "occupation". Cela se joue dans le relationnel, mais aussi dans un partage singulier, celui de l'écriture. L'écriture redonne vie, intérieurement comme vis à vis de l'extérieur. Petit à petit les participants ne voient plus de la même façon, ni leur propre vie, ni le monde. C'est là une transformation qui m'étonne et m'échappe, et pour laquelle je n'ai pas d'explication.

L'atelier de Verviers

Filigranes : En quoi réside la différence entre "Mots'art" et la vie quotidienne de la prison ?


P.L. : Peut-être dans le fait que l'écriture joue comme une évasion, une chose que personne ne pourra jamais leur prendre et qui tient dans le partage humain. Un partage en profondeur autour de questions telles que : qu'est-ce qui fait un être humain ? Qu'est-ce qui nous fait nous émerveiller ? Qu'est-ce qui nous fait nous révolter ? Le partage, c'est aussi la découverte qu'on a, avec d'autres, des préoccupations communes telles que la famille, la nécessité de maintenir avec elle un lien à tout prix, de continuer à en parler même quand on en est séparé, ou quand elle vous a abandonné ou qu'elle a été violente.
Quant aux personnes que je vois dans mes ateliers en ville, il n'est pas rare que les personnes se retrouvent ensuite en dehors même de l'atelier.

 

 

Filigranes : Peut-on, en prison, aborder n'importe quel thème, n'importe quel sujet ? As-tu déjà essuyé des refus ?


P.L. : Non, pas de refus. Il est, certes, arrivé qu'en cours d'atelier certaines discussions surgissent à propos de la détention, ou de la vie carcérale. Souvent la réaction des prévenus est de dire: "Là on est à Mots'art. Arrêtons. De ces sujets, on en parle assez tous les jours".
Pour être plus précise, j'insiste sur le fait que je n'aborde dans les ateliers d'écriture que des questions larges, des questions existentielles : qu'est-ce que la transformation ? Ou que signifie "rater" ? Donc, on ne va pas parler directement de thèmes tels que la violence par exemple, mais certaines choses vont pouvoir se dire à cette occasion.

 


Filigranes : Un participant peut-il tout dire dans un atelier d'écriture ? Peut-il tout écrire ?


P.L. : Je n'ai jamais eu de problème avec cela. Je n'ai jamais rencontré une personne qui aurait voulu régler des comptes avec une autre à travers l'atelier d'écriture. À partir du moment où chacun comprend qu'il doit respecter l'autre au sein de l'atelier, il peut écrire ce qui est important pour lui, c'est parfois un désespoir très noir. L'écrire, c'est aussi voir d'un œil nouveau ce qu'on est en train de vivre et cela permet de rebondir, un peu plus tard peut-être, sur autre chose.

 


Filigranes : Penses-tu qu'il puisse y avoir ici ou là une forme d'autocensure ?


P.L. : Non, quand ils ont vraiment envie de dire quelque chose, ils le font. En revanche, ils mettent du temps à croire à leurs écrits. Ils me disent : "Tu vois, j'ai écrit un petit truc, mais c'est rien." Ils ont surtout une image très dévalorisée d'eux-mêmes.

 

Filigranes : Quelles sont les premières paroles que tu leur dis ?


P.L. : D'abord, que l'on va faire de la poésie. Que l'on va aussi écrire sur ce que nous faisons, car nous avons des moments d'arts plastiques. Et que tout le monde est capable d'écrire ! Bien sûr, que l'on ne fera ni grammaire, ni conjugaison, même si, à la demande, on peut en parler autour d'un ou deux textes. Je leur dis surtout qu'il s'agira d'écrire ce que l'on pense.
C'est vrai, cela interpelle les personnes. Mais cette année j'ai beaucoup plus de facilité, car les ateliers sont à présent connus. Les écrits que nous avons produits l'année dernière, et que j'ai montrés, ont interpellé les nouveaux venus.

 

Filigranes : Et l'administration pénitentiaire ? Quelle est son attitude ? Lit-elle les textes ?

P.L. : L'année dernière, je travaillais en collaboration avec l'association SAD "le service aux étenus". C'est un service externe présent dans pratiquement toutes les prisons la Communauté Française de Belgique. Cette association travaille avec des pouvoirs subsidiants et produit donc un rapport d'activité auquel j'ai contribué. Cette année, je suis en lien direct avec l'éducatrice de la prison. Nous avons eu récemment une demande de l'administration pénitentiaire pour que nous disions en quoi consiste l'atelier d'écriture. Nous avons fait une description des visées de l'atelier et de quelques dispositifs. L'éducatrice m'a dit que son interlocuteur avait été surpris par la précision de la description… Cela ne va pas plus loin.

L'atelier de Verviers

Filigranes : Les textes produits sortent-ils de l'atelier ? Circulent-ils dans la prison ?


P.L. : A priori, les écrits restent dans l'atelier. D'une séance à l'autre, je saisis tous les textes et je les accompagne des productions plastiques que j'ai photographiées. La semaine suivante, je redonne à chacun l'ensemble des productions en photocopies couleurs. Si une personne souhaite partager ses textes, les montrer par exemple à une assistante sociale, à un avocat, la décision lui appartient. Voilà la règle.
Quand Filigranes nous a invités à envoyer des textes et sachant que le numéro traitait de la relation à l'autre – un thème que nous abordons beaucoup - la proposition d'y répondre favorablement a été très bien accueillie. L'idée de montrer à l'extérieur que les personnes incarcérées, des prévenus ou des détenus, sont aussi des êtres humains, cela a vraiment plu ! Ils ne s'attendaient pas ensuite à voir tous les textes publiés. Mais surtout, ils avaient envie de faire passer ce message-là.
Du coup, cela a provoqué l'envie de lire de la poésie. "Nous allons être lus par des personnes qui lisent de la poésie. Ce n'est pas n'importe qui !" D'où la grande fierté de se sentir à la hauteur d'une revue de ce type. Puis, quand vous avez précisé que par la suite vous souhaitiez recevoir d'autres textes de nous, cela a provoqué bien des réactions : "Cette idée m'a torturé la tête, j'ai eu plein de choses qui me sont venues" et "C'est quand le prochain livre de poésie ?". Dans la foulée, on m'a lancé un appel pour un nouvel atelier dans ce sens.
Pour eux, la poésie, c'est "la belle langue", or les textes que j'apporte et que nous lisons ensemble, ce ne sont pas que "de beaux textes" bien rimés, bien cadencés. C'est souvent proche du quotidien (Julos Beaucarne par exemple). C'est de l'engagement, de la musique. Eux, ont envie que tout cela leur devienne accessible. L'un d'entre eux lit Victor Hugo notamment.

 

Filigranes : Qu'est-ce qui, de ton point de vue, caractérise la vie en prison pour ces personnes ?


P.L. : L'enfermement, bien sûr, la privation de liberté. Beaucoup sont issus de milieux souffrants, défavorisés, vivant des situations tellement problématiques qu'ils ont parfois choisi des voies dangereuses. Les ont-ils choisies ? Pas vraiment. Je me souviens d'un jeune détenu l'an dernier qui disait avoir été mis à la porte de chez lui. Sans rien à manger, il a commencé à voler, un peu, puis de plus en plus, pour finalement tomber dans des circuits beaucoup plus dangereux, plus déviants. Quand on a le sentiment qu'il y a une énorme injustice par rapport à un système qui n'est plus viable, dans lequel on ne sera jamais personne… alors l'écriture fait soudain exister.
Ce qui est difficile avec la prison, c'est le cadre. Les couloirs, les clés, les barreaux, les demandes d'autorisations. Tout nous rappelle la privation de liberté.

L'atelier de Verviers


Filigranes : Pourquoi le passage par les arts plastiques ?


P.L. : Les participants démarrent souvent avec cette affirmation : "Moi je fais de l'art, et si ça valait des millions ?" Même en plaisantant, la question de l'argent arrive toujours sur le tapis. C'est en fait celle de la valeur : est-ce que ce que je fais vaut quelque chose ? Ceci aussi : "On se sent un peu comme des enfants". Comme ils me voient peindre, ils considèrent que "si même celle qui anime le fait, alors ce n'est peut-être pas n'importe quoi".
Pour moi, l'intérêt des arts plastique est aussi ailleurs. Comme nous travaillons sur des thèmes "larges" tels que l'existence, l'audace, l'indocilité, c'est intéressant de voir comment ils transforment cela en couleurs, en formes, en sculptures.
L'aquarelle "rebelle" (Pratiquer le dialogue arts plastiques – écriture, que vous avez publié à cinq) par exemple, voilà quelque chose qui marche à fond ! "Tiens donc ! Il y a une matière qui est comme nous, qui est aussi un peu indocile, qui ne veut pas rentrer dans les rangs, qui serait presque un peu délictuelle !" C'est une découverte et ce qui paraissait être du "n'importe quoi", s'avère être bien intéressant.
Quand, la semaine suivante, ils reçoivent les traces de leur travail mises en page en couleur, tout change. À la question : "Cette production, c'est moi ?, je leur réponds : "Oui, c'est toi !". J'entends alors : "je ne savais pas que je pouvais écrire ça".

 

Filigranes : Tu mènes des ateliers d'écriture dans des lieux très différents : la prison, les quartiers, des groupes intergénérationnels et donc mixtes… penses-tu pouvoir étendre un jour les ateliers aux gardiens ?


P.L. : C'est difficile, car ce qui nous dépasse, c'est qu'il s'agit là du contexte d'une prison, et donc d'un établissement qui, suite à un jugement, s'occupe de l'écartement de la société par la privation de la liberté d'être citoyen. Dans ce cadre, les détenus et prévenus sont des hommes qui dépendent d'autres hommes, de ceux qui, au quotidien travaillent au maintien dans les cellules, veillent à ce que les détenus ou prévenus purgent leur peine, les gardiens.
Savoir si, un jour, on pourra lever cette barrière séparant des hommes d'autres hommes, je ne sais pas. En tout cas, la publication de l'année passée, des gardiens l'ont appréciée, et certains l'ont achetée, c'est le signe d'un rapprochement pour se voir autrement, de part et d'autre.
Filigranes : Est-ce que tu parles aux détenus du "tous capables" ?
P.L. : Tout le temps. Tout le temps. Tout le temps. Et je dis souvent que les textes qu'ils écrivent sont puissants. "Puissants, se demandent-ils, mais qu'est-ce que cela signifie pour l'écriture ?" D'abord, ils rient, puis le mot fait son chemin dans les têtes. Je leur dis aussi que je parle d'eux à l'extérieur, que d'autres personnes lisent leurs textes et qu'ils les trouvent beaux.

 

Filigranes : Les participants peuvent-ils garder leur production, avoir un dossier ? Comment cela se passe-t-il matériellement ?


P.L. : Ils n'ont pas toujours le droit de conserver leurs productions plastiques mais le souhaitent ! Ils disent (à l'éducatrice ou à moi) : "Est-ce que tu peux me les garder dans un petit coin ? Quand je sortirai de prison, j'aimerais bien les emporter".
J'apporte donc tout le matériel. Je viens avec un gros sac, mes peintures, mes pinceaux, mes feuilles, mes brouillons, mes stylos Bic. Eux gardent les photocopies car c'est du papier et ce n'est pas dangereux. Je leur donne des dossiers souples pour archiver ce qu'ils ont fait. Et j'apporte du chocolat.

 

Filigranes : Justement, quels rituels installes-tu ?


P.L. : Le chocolat, c'est un rituel. On a chacun un morceau. On parlait du plaisir d'écrire, cela en fait partie : c'est le plaisir de partager quelque chose. Et ce qui est amusant, c'est de voir qu'il y a toujours un des participants qui s'approprie la chose, qui ouvre la boite, qui distribue…

 


Filigranes : As-tu le sentiment que, d'atelier en atelier, les personnes entrent dans une démarche de pensée ?


P.L. : Au départ, pour certains la pensée c'est flou et loin. Deux exemples. Le premier, un jeune de 19 ans, qui a écrit un jour "depuis que je viens à Mots'art, je me sens mieux et capable de m'exprimer sur tout". Pour lui, ce "tout" était jusque-là tellement confus, impossible à décortiquer, indigeste, impensable au sens propre du terme. Le second, c'est celui d'une personne qui, à propos de l'aquarelle, a écrit : "Aujourd'hui, pour la première fois, j'ai fait de l'aquarelle. Si j'avais été libéré, je n'en aurais certainement jamais fait, parce que avec ma femme, mes quatre enfants, j'aurais eu bien d'autres choses à faire !". Pour moi une démarche de pensée c'est prendre conscience des choses en s'en décollant, en prenant de la distance, regarder de loin, puis de plus près, puis de nouveau s'éloigner, et mettre les mots sur les différents points de vue.

L'atelier de Verviers


Filigranes : Finalement quels buts te fixes-tu dans l'animation de tes ateliers et qu'est-ce qu'une "relation" de qualité ?


P.L. : Ce que je cherche vraiment, c'est rencontrer les personnes, et qu'elles se rencontrent elles-mêmes. L'écriture est un chemin qui me passionne, qui est tellement fort. Il en existe certainement d'autres, mais ce que je cherche, ce sont des pratiques qui nous transforment, qui nous font prendre conscience que nous sommes tous des êtres humains, vivant sur une même terre, quoi que nous ayons fait, d'où que nous venions, quelles que soient nos perspectives.
Cela m'apporte de la joie de vivre, du bonheur à me lever le matin, de l'excitation à chercher des idées, la découverte de plein de livres, d'expos, d'artistes sur Internet et aussi, dans les musées, les galeries.
Quand il y a de l'authenticité, de la confiance, quand on arrive à être soi sans avoir peur, qu'on reconnaît l'autre dans ce qu'il est, sans essayer de porter d'abord un jugement, alors moi-même, je me vois différente et j'apprends beaucoup.
Voilà ce qui m'importe.

Entretien réalisé
en novembre 2012 par
Odette et Michel Neumayer
sur des questions collectivement
préparées en séminaire.

 

 

L'atelier de Verviers

 
 

"Des poètes et des coquillages »

Je suis assis sur le sable…
Je regarde les enfants jouer…
Je viens d'où ?
Coquillage jeté… après avoir été mangé !
Et maintenant je ne vois que ça.
En fait j'ai un trou…
Je ne sais plus comment continuer l'histoire…
Peut-être que le plus grand service qu'un individu puisse rendre au pays, et à la race humaine, est d'élever sa famille.
Alors là, je dis « CHAPEAU » !
René Berger

 

Coquillage, d'où tu viens, je ne le sais.
J'imagine que tu pourrais venir du magasin,
De l'étal du poissonnier, de la plage, d'un pays lointain…
Tu me fais rêver d'évasion,
De libération,
J'évacue ma frustration,
En rêvant de ton long voyage…
Pour enfin te retrouver
Enfermé avec moi.
Au bout du conte… il te pousse des pattes
Ce qui t'entraîne en vacances
Plus près des poissons…
Vincent Schmitz

 

Un début de vie chaotique,
Secoué par les rouleaux des vagues
Les trous et tâches indélébiles de l'abandon,
Mais sur son dos, accueille et aide des bateaux,
Espérant ainsi faire oublier tous ses fardeaux,
Puis lors d'une ligne très bien marquée,
D'une vie de merde enfin débarqué,
Pour un nouveau départ très remarqué.
Sébastien Grand-Jany

 

Un coquillage sur la plage
J'imagine les vacances et le soleil
Des vacances que je souhaite longues et chaudes
Sans foulard.
Fernando Ricci

 

 

 

° ° °

 

« Un fil pour traverser le monde… et la vie »

J'ai choisi de vivre d'une certaine manière, à un moment de ma vie sans me soucier des conséquences. J'ai choisi la vie facile sans me demander à quel prix je la vivais. Et seulement aujourd'hui je me rends compte que c'était un choix égoïste, pour quelques instants de bonheur, quelques sourires que je leur ai offerts. Maintenant ils doivent en payer le prix, sans jamais l'avoir choisi. Et de leur père, frère, enfant sont privés les êtres qui me sont les plus chers. Toi qui lis ceci, prends conscience des richesses qui t'entourent dont la plus grande est la famille. Ces personnes qui te sont chères ont une vie éphémère. Alors si tu dois choisir, essaye de ne pas penser qu'au bonheur, car la vie c'est ¾ de malheur pour ¼ de bonheur… et le tout est de savoir profiter de ces instants qui, même sans argent, peuvent être très grands.
Bernard Baltus

 

Ne venez jamais en prison
Ne fumez jamais de la came
Et n'oubliez jamais de dire « je t'aime » à vos proches.
Pourquoi ?
Parce qu'un accident est très vite arrivé
Mais il ne faut pas le dire si on ne le pense pas
Une famille on n'en a qu'une
Je dis ça car moi j'ai 19 ans
J'ai un enfant
Et je n'ai jamais dit « je t'aime » à ma famille
Et si je les perdais
Je m'en voudrais.
Maxime Briamont

 

Je suis grimpé là-haut
Car c'était mon heure.
J'ai fait tout pour me sauver de ma maladie
J'ai fait tout pour survivre
Car j'étais heureux avec ma famille, mes proches.
Mais Dieu me voulait.
Voilà.
J'espère que Dieu veillera sur ma famille,
J'espère que ma femme et mes enfants seront heureux.
Gros, gros bisous à tous.
Steve Schyns
Évasion colorée
Après avoir vu ces couleurs,
Une évasion colorée m'est apparue
Un délire de couleurs dans ma tête
Un instant de bonheur en géométrie
Un souvenir de mes enfants débutant dans la peinture
Un peu de couleur dans le noir de ma vie.
David Verbeeck

 

Je veux vivre ma vie en toute simplicité.
Je prends des risques tous les jours en sortant.
Je suis capable de faire l'impossible.
On n'a jamais vu de funambule comme moi.
Mon monde est dangereux,
Mais il vaut la peine de le vivre.
Je n'ai pas peur de tomber,
Parce qu'on m'a toujours appris à me relever.
Je grimpe là-haut,
Pour dire que je reste seul maître de mon destin,
et le capitaine de mon âme.
Mustafa Koç

 

Le monde meurt…
L'individualisme fait figure de proue.
Protège-toi et préserve ta famille,
Protège ta famille et préserve toi…
Si tout le monde s'attelait à agir de la sorte,
Un deuxième souffle à cette terre serait donné…
Une vie meilleure pour beaucoup d'entre nous,
Et une nouvelle route vers l'espoir serait en construction.
Plus d'actes censés, pour plus de bonheur,
Moins de bêtises commises, pour moins de malheur…
Je vous souhaite le meilleur.
Fred Ansay

Dans ce monde minable,
Où tout est régi par des pickpockets aux ongles de rapaces
Qui se prennent pour des Robins des bois.
Dans ce monde inhumain
Où tous courent après des bonheurs avec date de péremption
Dans ce monde dangereux où on ne veut devoir rien à personne
On marche sur un fil.
Dans ce monde où comme un funambule entre le libre et l'interdit
Je me croyais indestructible
Je suis tombé.
Maintenant, dans ce désert à traverser
Où le temps n'existe pas,
Il nous faut persévérer
En attendant la liberté
Au bon vouloir de ceux qui ont les clés.
Bertrand Gilles

 

Traversée 
Équilibriste à mes heures perdues,
je jongle entre les « échecs » et les réussites de ma vie.
Tantôt noir, tantôt blanc,
Il ne faut pas oublier de dire "je t'aime" à nos enfants.
La vie est faite d'épreuves positives et négatives,
De moments de joie et de tristesse.
Mais il n'y a pas d'échecs,
Il y a juste des apprentissages.
Persévérer est la meilleure des solutions,
C'est la clé de toutes les prisons.
On apprend de ses erreurs,
On tire les leçons du passé
Pour un présent plus serein et un avenir aux couleurs de l'arc en ciel
N'oubliez pas, on n'a qu'une vie, elle est déjà si courte !
Chaque seconde de bonheur,
Si petite qu'elle soit,
Est une heure de gagnée vers la joie de la liberté intérieure.
Jacqueline Piette
(Éducatrice de la prison, qui participe à l'atelier)

 

J'aimerais vivre libre,
Libre d'aller où je veux comme un oiseau au gré du vent,
J'aime la simplicité et l'espace.
Je vis comme un funambule au delà des limites,
Car je déteste ce système de consommation.
J'ai la haine de tout pouvoir,
Mais j'aime ma vie et ne regrette rien !
Sébastien Ricci